Alerte au désenchantement démocratique

Texte Unité et Action et sans tendance, d’entrée au CDFN FSU des 15 et 16 octobre

Certes la France n’est pas la Hongrie de Viktor Orban, ni la Turquie de Recep Erdogan, encore moins la Russie de Vladimir Poutine.

Les libertés sont globalement respectées, la presse demeure libre même si sous pression de plusieurs grands capitalistes, le syndicalisme n’est pas interdit et les droits du monde du Travail, quoique toujours menacés ne sont pas fondamentalement remis en cause.

Bref la France n’est pas une dictature ni même, quoi qu’on puisse lire çà et là, un régime « illibéral ».

Cela veut il dire pour autant que notre démocratie se porte bien ?

C’est là une toute autre histoire.

Le pays a vécu depuis le printemps dernier une intense période politique et sociale.

L’inconséquence d’un Président trop sûr de sa bonne étoile a failli amener au pouvoir l’extrême droite nationaliste, xénophobe, raciste et anti sociale.

Le syndicalisme a joué un rôle déterminant pour s’opposer à cette catastrophe, en encourageant l’unité de la Gauche, en soutenant le programme du NFP et en s’inscrivant clairement, au-delà des mots utilisés, dans un barrage républicain qui a largement fonctionné.

En portant en tête le NFP, certes culminant à 30 % des suffrages, l’électorat avait dit sa volonté d’en finir avec les politiques libérales qui depuis des décennies ruinent les services publics et enrichissent les puissants.                                                                

L’habileté manoeuvrière du Président Macron, les fragilités internes sans doute du NFP, accouchent aujourd’hui d’une situation politique qui dégage une curieuse impression de continuité sur le fond des politiques menées et des intérêts servis.

Arguant d’un endettement pourtant creusé par des années de cadeaux fiscaux aux classes possédantes, le « nouveau » gouvernement s’apprête à engager le pays, et d’abord le salariat, actif comme retraité, dans une cure d’austérité semblable à celle qui entraîna l’économie dans la récession après la grande crise financière de 2008. C’est l’école publique, vue comme un réservoir de postes, qui est désignée comme principale victime de cette politique violemment anti-sociale, tout comme la fonction publique territoriale, accusée de tous les maux.

Comme toujours pour les pseudo « libéraux », la facture des dysfonctionnements du capital doit prioritairement être réglée par le travail.

Et à nouveau l’on entend dans les médias aux ordres les discours sur une France « qui ne travaille pas », des Français trop « assistés » et des étrangers, bien sûr, plus avides de « profiter » du système de protection sociale que de construire les routes ou de prendre soin des personnes âgées…

Vieilles rengaines pleines de morgue de classe.                                                                                                         

Les mesures annoncées par le Premier Ministre, au-delà d’un mince rideau de fumée sur l’imposition des plus fortunés, confirment l’aggravation des politiques libérales : les 40 milliards de réduction des dépenses publiques seront financés, sauf réponse forte du monde du travail, par de nouvelles dégradations des services publics, qu’il s’agisse de la santé, de l’éducation ou de la recherche, des salaires et des pensions, ainsi que des politiques de solidarité menées dans les collectivités territoriales.                                                               

Et qui là encore préparent le terrain au retour qui pourrait bien être gagnant d’un RN qui joue habilement des souffrances sociales pour mieux diviser le monde du travail et préparer sa victoire en cas de nouvelles législatives.

Mais aussi qui alimentent le sentiment que le vote démocratique comme la mobilisation syndicale sont inutiles puisque, finalement, rien ne change, sinon en pire.

D’autant que, soumis à la bienveillance intéressée du RN pour survivre à l’assemblée nationale, le gouvernement Barnier là aussi s’inscrit dans le basculement de la Droite LR et macroniste vers les thèses d’extrême Droite, largement entamée au moment de la loi « immigration »,  que la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon vient d’annoncer la nécessité de renforcer.

Le choix d’un ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche réactionnaire, dont les premières déclarations consistent à s’attaquer aux libertés universitaires en prétendant interdire les manifestations de solidarité envers le peuple palestinien, et les premiers contacts avec le syndicalisme étudiant s’établissent avec l’UNI, s’inscrit dans cette porosité des idées toujours plus affirmée entre Droite « républicaine » et Extrême Droite, dans un scénario à l’italienne.

Un scénario alimenté par l’entretien, favorisé par des médias de masse complaisants, de tensions qui déchirent la société française et entretiennent un climat malsain, qu’il s’agisse après les massacres du 7 octobre de la montée de l’antisémitisme mais aussi de l’assimilation des Musulmans de France au fanatisme islamiste, ou du développement de thèse masculinistes en réaction à la juste et toujours à approfondir la lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes, et contre toutes formes de violences sexistes et sexuelles.

C’est bien là pour Unité Action & ST la double responsabilité du mouvement syndical et donc de la FSU : défendre une certaine idée de la solidarité et de la justice en continuant à mobiliser sur les questions sociales et de redistribution, qu’il s’agisse des retraites – au-delà de l’imposture des manœuvres cousues de fil brun du RN – des salaires, des conditions de travail, de la démocratisation de l’Ecole, de la Fonction publique et des services publics.

Et aussi, par cette action avec le salariat, défendre la démocratie et créer les conditions d’un éloignement durable du pouvoir politique pour l’extrême droite, en donnant, en toute indépendance, des perspectives ambitieuses et crédibles de véritables politiques de ruptures, et en s’attaquant au racisme et aux idées d’extrême droite, notamment quand elle s’expriment sur le lieu de travail.                                                                                              

Pour Unité Action & ST, seuls le dialogue transparent avec les forces politiques de Gauche, accompagné obligatoirement d’une mobilisation sociale de masse, permettront de mettre fin au sentiment d’impuissance qui mine aujourd’hui la confiance dans la démocratie, à la grande satisfaction de ses ennemis.